Diamant pourpre: un space opéra inachevé?
Même s'il est de bon ton d'être connivent avec toutes les productions artistiques non professionnelles gratuitement offertes au public, vous m'excuserez l'appréciation directe et tranchante qui suit. Car si les musicalités promettent beaucoup par leur dimension orchestrale aux accents hollywoodiens, leur interprétation et mise en image avec 3 élèves des classes de théâtre et deux de chant du conservatoire d'Epinal, ressemble à un mauvais alibi pour justifier du titre largement pompeux de "space opéra".
Un rayonnement départemental à confirmer
Les 60 musiciens - y compris de très jeunes élèves en seconde année de conservatoire- qui se sont rendus disponibles pour jouer le "Diamant pourpre" ont constitué une véritable fédération avec l'intégration des élèves et enseignants des écoles de musique de Vittel, Rambervillers et Remiremont. L'interprétation collective et départementale ne démérite pas et la centaine de spectateurs à chaque représentation, scotchés à leur siège, saisis par la construction polyvalente, ont chaleureusement salué les artistes malgré une mise en scène passablement incomplète. Je me souviendrai tout le reste de ma vie de l'épouvantail à lunette futuriste, sensé représenter un humanoïde-envahisseur menaçant , figé pendant de longues minutes dans une posture pathétique... incompréhensible.
C'est en rodage?
Le créateur de la pièce, n'ayant été présent qu'à l'église de Rambervillers -dans une tenue noire à la façon de Gandalf le gris du seigneur des anneaux- on pouvait imaginer qu'il ne s'agissait que de représentations de rodage avant une future démultiplication, plus étoffée dans ses chants et la théâtralisation. Gardons espoir que les plus jeunes n'ont pas été démotivés par le jeu synthétique des acteurs - certains s'inquiétant de leurs silences pensaient qu'ils ne connaissaient plus leurs textes...- et l'absence d'envergure de la mise en image.
L'exigüité des salles inadaptées de Remiremont (avec un manque dramatique de profondeur de la scène) , de l'église de Rambervillers ( trop plat, on voyait rien) ou de Golbey ne parvient toutefois pas à excuser l'incomplétude de la pièce.
L'inexistence de la mise en scène ( avec notamment des postures caricaturales des acteurs manifestement abandonnés), le manque de moyen ( décors et costumes), la faible densité et qualité des chants -sans paroles-sabordent la visée pressentie du Diamant pourpre dont l'histoire alambiquée et l'intrigue bienpensante- vaguement "fantaisy" plus que "space"- ne laissera manifestement pas de trace intemporelle en l'état.
Tout le monde ne peut pas faire du Alain Damasio!
C'est dans ce genre d'interprétation, même amateur, que l'on constate qu'un véritable écrivain sinon scénariste est indispensable. Ainsi qu'un coordinateur artistique dédié. Si la bonne volonté de tous doit être saluée , cela ne suffit pas à rendre hommage au travail effectué par l'auteur et les interprètes. On doit malheureusement relever les hésitations des acteurs, la lenteur des transitions, la narration façon kermesse de patronage, l'absence de chœurs puissants et d'une coloratur, les contrastes dodécaphonique du rendu (à tour de rôle du piano, des percussions ou des cuivres à Remiremont, moins notable dans les représentations suivantes).
Tout en évitant d'être sentencieuse ( ce serait à vomir! beuark, je me dégoute), le travail méritoire des artistes amateurs et professionnels vosgiens ne suffit pas à faire d'un brouillon artistique lorrain une composition remarquable. Que les interprètes soient chaleureusement félicités pour leur implication, leur gout du bien faire n'aura malheureusement pas suffit à faire du "Diamant pourpre" un joyau. Se donner les moyens d'en faire une pièce aboutie et de qualité est le plus gros enjeux. Moins d'ambitions pour pouvoir mieux faire?